Les clichés sur les correcteurs

29 juin 2021

Depuis que je dis aux gens que je suis correctrice (et même lorsque je suivais ma formation), les réactions de mon entourage sont assez… Disons, intéressantes. Je lis également des commentaires sur internet vis-à-vis des correcteurs qui me font parfois hausser un sourcil (voire deux, selon les cas).

Ici, j’ai répertorié quelques-uns d’entre eux, qu’il s’agisse de questions légitimes ou de remarques plus… cocasses.

« Je ne savais même pas que ça existait ! »

C’est sans doute la réaction que j’obtiens le plus souvent quand je parle de mon métier. Ça, et : « Correction… Euh, dans quel domaine, exactement ? » qui est souvent une façon détournée d’avouer son ignorance.

Je ne sais pas pourquoi tant de gens ignorent que les correcteurs existent. Je pense qu’ils s’imaginent que les auteurs de romans et les journalistes, puisqu’ils baignent dans le milieu littéraire, sont suffisamment doués pour se relire eux-mêmes. Ou alors, qu’ils n’ont même pas besoin de relecture, que le texte apparaît, dans une fulgurance artistique, tout beau et tout propre dès le premier jet !

Gravitant autour de ce milieu depuis plusieurs années, j’avoue que l’existence des correcteurs (cette créature mythologique !) m’a toujours parue évidente. Et pourtant, lorsqu’on n’écrit pas, qu’on ne se renseigne pas à ce sujet, je peux comprendre que notre existence passe inaperçue.

L’une des causes de cette invisibilisation est peut-être le fait que le nom du correcteur n’apparaît nulle part sur les livres. Je n’ai jamais vu, dans un roman, le correcteur être crédité – alors qu’on y trouve le nom du traducteur, toujours. Nous sommes pourtant un maillon de la création du livre. Il y a sûrement une explication légitime à cette absence, mais j’ignore laquelle.

Ce n’est pas bien grave, au fond. Souvent, les gens sont plutôt curieux et bienveillants, mais ça m’arrive vraiment souvent !

« Ah, mais c’est quoi correctrice ? J’avais compris traductrice, moi ! »

Eh oui. Une ou deux personnes se sont emmêlé les pinceaux !

C’est plutôt une anecdote rigolote (si d’autres correcteurs passent dans le coin, je me demande si ça vous est arrivé aussi !), néanmoins, elle a été accompagnée d’une réaction plus… enfin, moins… Je vous laisse juger par vous-même, la voici :

« Mais alors, c’est facile en fait comme truc ! »

Ah, ah.

J’aurais dû leur faire une interrogation surprise sur les verbes intransitifs tiens, puisque c’est si facile.

D’autant plus que certains cas délicats méritent un œil formé, qui puisse trancher entre plusieurs cas de figures possibles ! Non, tout le monde ne peut pas le faire, et c’est pour cela que j’ai dû suivre une formation, justement. Je pense qu’il faut, au minimum, s’être auto-formé en lisant des ouvrages d’experts (le Dictionnaire des règles typographiques, notamment) et qu’avoir reçu un véritable enseignement dans ce domaine est toujours préférable.

« Oui, mais enfin, il existe des logiciels de correction qui fonctionnent très bien ! »

Ah, enfin une interrogation légitime ! Plus ou moins.

C’est vrai, les logiciels peuvent dépanner en cas de besoin. Néanmoins, même le plus efficace d’entre eux est extrêmement faillible. Le logiciel n’a pas la sensibilité d’un être humain, il applique « bêtement » les règles que ses créateurs ont inscrites dans son code, et fait preuve d’une rigidité souvent… exaspérante.

Nous allons prendre l’exemple d’Antidote, puisqu’il est à mon sens le plus élaboré des correcteurs informatiques. Parfois, le logiciel ne comprend pas ce que vous voulez dire. Quelques exemples avec des phrases issues de mes articles :

De plus, en cas de doute sur un passage spécifique, le correcteur humain pourra toujours vous poser des questions directement, pour mieux comprendre où vous voulez en venir. Avec un logiciel, il n’est pas question de négocier ! Il ne comprend pas les effets de style (les répétitions volontaires par exemple) ni certaines incises, considérera le vocabulaire familier comme une faute, et associera parfois les adjectifs avec le mauvais nom, ou le verbe avec le mauvais article ! Tout ce que vous pouvez faire, c’est l’ignorer. Frustrant.

Ici, on a un bon exemple : le logiciel pense que « cher » se rapporte aux clients, ce qui n’est pas le cas. Bien sûr, dans ces moments-là, il est facile de voir qu’Antidote se trompe… Sauf qu’il en produit vingt par texte, des « alertes » de ce genre !

Dans cet exemple, il est incapable d’analyser l’incise, qu’il compte comme une « rupture ». C’est particulièrement frustrant quand on écrit un roman par exemple, car il peine à comprendre beaucoup d’effets de style, ainsi que le registre familier.

Dans certains cas, il se peut que vous ne vous rendiez pas compte qu’Antidote fait une erreur, et que vous corrigiez (mal, du coup) ce qu’il vous dit.

Bref, c’est un bon outil, certes, mais qui ne vaut néanmoins pas un œil humain !

« Oui, mais ça coûte cher ! »

Les correcteurs sont souvent des autoentrepreneurs : ils ont leur propre entreprise et sont leur propre patron. Si cette situation apporte une liberté fort agréable, elle est accompagnée d’un certain nombre de charges. Entre les impôts et les cotisations, environ 25 % du chiffre d’affaires s’envole !

De plus, nous n’avons pas de congés payés. Si on ne travaille pas, pas d’argent ! Nous avons le droit de partir en vacances, comme tout le monde, alors il faut bien inclure ce temps de pause dans le prix. Au final, pour toucher un SMIC (c’est un exemple, mais évidemment, les autoentrepreneurs ont le droit de vouloir être payés plus cher que le seuil minimal) le correcteur doit donc facturer ses clients plus cher que le SMIC effectif.

Accepter d’être sous-payé serait handicapant, non seulement pour nous, mais également pour les autres correcteurs du milieu, car ce serait de la concurrence déloyale ! Une situation à éviter à tout prix, donc.

Ainsi, tout le monde ne peut pas se payer une correction. C’est un fait. Dans beaucoup de cas, la correction est un service non indispensable, et donc un luxe. Dans certains cas, par exemple dans celui d’un livre auto-édité, il s’agit d’un investissement – à mon sens, nécessaire – afin d’apporter le meilleur produit possible à vos lecteurs.

J’en profite pour préciser que je propose un tarif étudiant, sur présentation d’un justificatif, pour vos mémoires, rapports, mais aussi romans, etc. !

En conclusion

J’espère que cet article vous aura fait rire dans sa première partie, et levé quelques interrogations dans la seconde moitié ! J’écrirai peut-être une suite, si j’entends de nouvelles remarques, qu’elles soient absurdes ou pertinentes !

Et vous ? Quelles sont les idées reçues que vous avez, ou aviez, à propos des correcteurs ? N’hésitez pas à répondre dans les commentaires !

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